Écrit par François Béharel pour Les Echos
Les salariés français, qui connaissent en moyenne près de cinq entreprises au cours de leur carrière, ont fait de la mobilité professionnelle une réalité. Ce constat signe l'avènement d'une logique multi-employeur et relègue aux oubliettes l'époque, pas si lointaine, où faire carrière au sein d'une seule et même entreprise était la norme.
Les salariés français, qui connaissent en moyenne près de cinq entreprises au cours de leur carrière, ont fait de la mobilité professionnelle une réalité. Ce constat signe l'avènement d'une logique multi-employeur et relègue aux oubliettes l'époque, pas si lointaine, où faire carrière au sein d'une seule et même entreprise était la norme.
Si ce fait mérite d'être salué, certaines caractéristiques du marché du travail invitent à la prudence. Ainsi, coexistent en France un chômage élevé et une pénurie de qualifications qui affecte peu ou prou tous les secteurs de notre économie.
Ce paradoxe se traduit par un marché du travail marqué par une inadéquation forte entre l'offre et la demande qui est de nature à brider l'essor de la mobilité professionnelle. Les nombreux départs à la retraite des salariés baby-boomeurs risquent même de précipiter ce scénario tant notre culture du recrutement est figée. Or, en la matière, il n'y a pas de fatalité. Nous, entreprises, devons jeter les bases d'un aggiornamento du recrutement. A rebours de schémas bien ancrés, nous devons cesser de recruter des clones. Car, trop souvent, lorsqu'elle recrute, l'entreprise va jeter son dévolu sur le parfait sosie du collaborateur qu'elle cherche à remplacer.
Cette vision du recrutement ne fait plus sens à l'heure où les compétences évoluent et où certains métiers disparaissent tandis que d'autres n'existent pas encore.
C'est pourquoi j'ai la conviction, qu'au lieu de privilégier la sécurité, nous devons prendre des risques. Et donner des perspectives.
Par exemple en faisant évoluer nos salariés d'un service à l'autre ou vers des nouveaux métiers. Ou en osant recruter des salariés qui viennent d'horizons très différents. De l'industrie aux services, la greffe peut être couronnée de succès !
Bien sûr, cela n'est pas sans risque, car le recrutement est un réel investissement. D'où la frilosité d'une partie des services de ressources humaines, dont la raison d'être, pourtant, est de faire évoluer les collaborateurs. Ainsi, selon une étude de l´Ifop, seuls 15 % des DRH estiment qu'il existe des passerelles entre les métiers ou les secteurs d´activité.
Dans ce contexte, le potentiel de développement de la mobilité professionnelle est considérable. Une enquête du Conseil d'orientation pour l'emploi nous apprend en effet que près de 2 salariés sur 3 (61 %) aspirent à une mobilité professionnelle - un enthousiasme qui, au demeurant, ne vaut généralement pas pour la mobilité géographique.
Ce désir de changement doit se traduire, aussi chez les salariés, par une prise de risque. Elle doit les conduire, en se formant à de nouveaux métiers, à préserver leur employabilité. L'enjeu est ni plus ni moins d'anticiper les transformations à venir du marché du travail... au risque de les subir.
Car ces transformations, impulsées par le besoin de souplesse des entreprises et le développement des nouvelles technologies, bousculent non seulement notre rapport au travail, mais aussi le déroulé de nos carrières. Du salariat à l'autoentrepreneuriat en passant par le portage salarial, salariés et entreprises devront à l'avenir jongler entre ces différents cadres juridiques. C'est pourquoi je suis convaincu de la nécessité d'instaurer dans les entreprises de véritables politiques de sécurisation des parcours professionnels. Enjeu fondamental du changement, la sécurisation des parcours professionnels est le vecteur d'une prise de risque maîtrisée. Sa mission ? L'anticipation des compétences nécessaires aux métiers de demain pour mieux faire correspondre offre et demande. Ses outils ? La validation des acquis de l'expérience, le droit individuel à la formation ou l'alternance, bref, la formation tout au long de la vie.
Mais bien qu'indispensables, de tels outils ne peuvent à eux seuls renforcer la mobilité professionnelle.
Son essor est conditionné à la responsabilité collective des entreprises et des salariés, mais également des pouvoirs publics, qui doivent jouer leur rôle d'éclaireur sur les nouveaux métiers et de promoteur du changement.
Bien entendu, pour fluidifier la mobilité professionnelle, une refonte du système serait certainement la solution tant les freins sont nombreux. Mais le paradoxe français, bien connu, qui nous fait désirer les réformes autant que nous les haïssons doit nous obliger à anticiper et à contourner ce puissant anesthésiant.
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François Béharel est président de Randstad France
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